La critique a reproché à edward said, qui établit un lien entre les représentations fournies par les orientalistes et l’impérialisme européen, d’avoir fait l’impasse sur le xviiiè siècle, époque où l’image de l’orient était assez positive voire idéalisée. l’étude du voyage botanique de desfontaines, nous invite à reconsidérer les deux points de vue. la curiosité scientifique et le plaisir de l’exploration, théorique et pratique, poussent l’homme de science vers des rivages nouveaux qu’il tente de connaître en en découvrant les lois générales, acte qu’il perçoit comme une « conquête » ( selon le mot de desfontaines ). dans son « eloge historique de m. r. desfontaines », m. flourens, secrétaire perpétuel de l’académie des sciences le confirme mais, le savant est pris au piège de sa propre méthode. sa logique biologique se heurte à l’infinie multiplicité du monde ontologique. en procédant à la classification des climats et des races et à la hiérarchisation des sociétés humaines, il glisse de « l’étude de la nature » au « « naturalisme idéologique » qui tient du principe d’une « destination sociale assignée à telle ou telle catégorie », selon sylviane agacinski.12’ c’est ainsi que le voyageur s’écarte de la réalité qui se déploie sous ses yeux et ouvre la voie aux idéologues, politologues, et aux théoriciens de l’inégalité entre les êtres, groupes, peuples, races. le cas de desfontaines est intéressant dans la mesure où il montre que le « racisme scientifique » peut être pensé par le scientifique ou ses lecteurs et ses éditeurs.

Bonjour chers collègues, mesdames et messieurs, chers étudiants, merci d’être présents à cette heure matinale. c’est un honneur pour moi de prendre la parole à l’ouverture de ce colloque, consacré à « la tunisie sous la plume des voyageurs à l’epoque moderne ». bienvenue aux participants qui ont répondu à l’appel à communication lancé par le département des lettres de l’académie beït al-hikma que je remercie pour son soutien en la personne de son président le professeur abdelmejid charfi ainsi que l’ensemble de ses services dirigés en main de maître par madame thouraya lasram directrice générale des lieux. je remercie mes collègues pour la confiance qu’ils m’ont accordée. nous voici donc réunis autour d’un sujet que j’avais proposé aux membres du département des lettres auquel j'appartiens. l’objet de mes recherches depuis une trentaine d’années a été, la mer ( comme élément ) et l’aventure marine au xviiè siècle. puis peu à peu, mes investigations ont porté sur la méditerranée, ce qui m’a permis d’approfondir mes connaissances sur son histoire plurielle et son impact sur la littérature. lien entre l’afrique, l’europe et l’asie mineure, nombril du monde jusqu’aux grandes découvertes, foyer d'une intense activité commerciale, mare nostrum a été, dès tantiquité le lieu de passage de personnages plus ou moins illustres qui, par nécessité professionnelle, religieuse ou guerrière, empruntaient la voie maritime pour parvenir à destination. elle fut le théâtre d’événements épiques mettant en présence les civilisations byzantines, latines et arabes et s’imposa comme plaque tournante du commerce et comme espace d’échanges vivant, utile et incontournable. ces faits l’ont aussi convertie en lieu de convoitise, de dangers et d’aventures’1’. les pays riverains ont été les témoins silencieux de cette effervescence. pour notre rencontre d’aujourd’hui et par atavisme sans doute, j’ai arrêté mon choix sur la tunisie, comme source d'investigations. sa situation géographique privilégiée, au coeur de la méditerranée, lui confère une histoire exceptionnelle. frontière naturelle entre la partie orientale et occidentale de mare nostrum, elle est aussi un facteur d’interaction entre l’europe et l’afrique et entre les trois religions monothéistes. située à l’extrême nord-est de l’afrique, la tunisie est bordée sur deux faces par la plaine liquide. l’une est tournée vers 1 ’europe dont elle n’est séparée que de 140 kilomètres, l’autre est tournée vers l’asie.